SE PA FAUT MWEN

22 November 2014 Editorial

Je fais partie d´un peuple qui, tout au long de son histoire, n’a jamais été fautif. La phrase la plus utilisée chez nous est le titre de cet article, « SE PA FÒT MWEN ».

Tout d’abord, le commerce d’esclaves a rendu Haïti malheureux ; il y a 200 ans, les français étaient coupables des horreurs de la colonisation, c´est un fait. Ensuite, pour justifier notre état actuel, nous avons cherché des coupables chez les français puisqu´à cause de la France, nous devions payer une dette énorme pour avoir obtenu notre indépendance. Après, la culpabilité fut héritée par les américains pour avoir occupé notre territoire durant deux décennies ; et maintenant, c’est clair que la communauté internationale est, dans son ensemble, coupable de la situation de pénurie économique et sociale que traverse notre Haïti.

Comment explique-t-on l’innocence d’un peuple dans son ensemble tout au long de plus de 200 ans? Est-ce que chez nous la responsabilité de tous nos maux relève des « blancs », des étrangers ? Et nous, qu’avons-nous fait ou pas fait? Quelle est la responsabilité des Haïtiens ? Apparemment aucune, car à n’importe quel niveau on entend la fameuse phrase : se pa fòt mwen !!!

Pendant des décennies, on nous a appris, soit à l’école ou à la maison, que la grande conquête de notre nation fut celle d’être les citoyens de la première République noire du monde, un exploit contre le grand Napoléon. On a alimenté cette fierté jusqu’à l’exténuation ; on a répété ce fait historique jusqu’à la satiété durant des générations. Mais de quelle fierté parle-t-on quand juste après 1804 on a oublié de construire le présent ou de travailler pour le futur ? Fiers de notre passé, oui ! Et du présent ? Il faut que nous arrêtions de vivre dans le passé en évoquant à tout bout de champ notre exploit d’avoir gagné la guerre contre l’esclavage. Oui, c’était une prouesse ; mais une prouesse du passé. Nous ne devons plus laisser que ce succès historique médiatise notre futur et croire que tout a été fait.

D´un point de vue historique, j´ai la triste impression que mon pays est resté figé en 1804. Cette situation est la conséquence du fait qu´Haïti n´ait jamais bénéficié de la meilleure direction politique, et ceci est incontestable. La plupart de nos dirigeants se sont faits remarquer par l’incapacité, la corruption, la violence et l’imposition sur les autres à tout prix. Notre histoire est même témoin de cas grotesques de leaders politiques qui, pour essayer de garder indéfiniment le pouvoir pour eux et leurs familles, se sont transformés en rois ou empereurs de royaumes la plus part des fois caricaturesques, ou encore ont instauré des dictatures affreuses avec droit à la succession. Comme le juriste Bernard Gousse a dit dans un discours prononcé récemment, notre histoire est « pleine de luttes contre les pouvoirs autoritaires qui engluent depuis toujours notre nation dans son envol vers le progrès ». De tels témoignages politiques déplorent un pays où règne loi de la jungle, tous contre tous, où prolifèrent des opportunistes répugnants durant ces deux derniers siècles, ce qui a représenté et demeure encore un obstacle insurmontable, empêchant tout avancement économique ou social.

A ce problème s’ajoute aujourd’hui la question de l’identité nationale : l’Haïtien ne sait vraiment pas s’il est américain ou africain. Au lieu d´avoir à travailler pour la construction d’un être national concret, comme cela a été le cas de la plupart des républiques latino-américaines, les dirigeants de pratiquement toute notre histoire indépendante se sont concentrés sur leurs exclusives ambitions personnelles ou celles de leurs clans. Et le peuple, conscient des abus des classes politiques, s’est réfugié dans une mentalité magique qui les a écartés de la vie moderne et du progrès, les maintenant dans un monde irréel dominé par des forces surnaturelles incontrôlables par définition, un monde commandé par des « dieux », des « loas », des « oungan » et des « bòkò » qui imposent l´univers des « lougawou », des « zonbi », de la magie noire ou des sectes secrètes. Le grand romancier britannique, Graham Greene, qui connaissait très bien notre pays, nous a définis comme la « République du cauchemar ».

Peur est le mot clé. Car la peur est une de nos principales caractéristiques identitaires, nous les Haïtiens.

Peur de l’inconnu surnaturel, bien exploité par des profiteurs des religions.

Peur des abus constants de la classe politique.

Peur des excès de pouvoir des puissants, des chefs, que ce soit au haut niveau de l’Etat, des collectivités territoriales, des quartiers ou mieux encore et précisément au niveau des élites intellectuelle ou économique de notre pays.

Peur même des fouets des pères ou mères de famille.

Peur de s’accepter tel qu’on est.

Un pays avec les mains attachées par la peur ne pourra jamais avancer !

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Il faut le dire haut et fort, les coupables ne se trouvent pas ailleurs. Nous les haïtiens sommes les seuls coupables. Et pour mieux préciser, la responsabilité tombe surtout sur les épaules des dirigeants, de la classe politique dans son ensemble, en tant que guide du pays. Mais je ne parle pas seulement de la classe politique actuelle ; non, je signale toute la classe dirigeante depuis 1804.

Il n’y a pas un cas similaire au notre dans l’ensemble du continent américain. Si l’on regarde autour de nous on voit que les nations centroaméricaines progressent, que la Jamaïque progresse, que nos voisins dominicains progressent, que même les pauvres et petites îles de la Caraïbe progressent. Et nous ? On dirait que nous, au contraire, nous perdons des positions dans les échelles qui mesurent l’avancement des nations, comme l’Index de Développement Humain. Et cependant, nous nous réjouissons encore d’avoir vaincu les blancs il y a deux siècles. Mais depuis, nous avons raté la plus simple tâche de construire une nation car évidement nous n’avons pas été capables d’apprendre à vivre en communauté nationale malgré tout ce temps de vie indépendante. Et en attendant nous exhibons et proclamons fiers, sans honte, la devise de nos armes : « L’union fait la force ». C’est ironique! De quelle union parle-t-on ?

Nous avons besoin d’un bain de réalité. Nous devons entrer dans la réalité de la terre que nous, tous les humains, partageons. Nous devons atterrir sur l’évidence d’un monde matériel formé de personnes avec leurs intérêts et leurs rêves de progrès ; un monde réel dans lequel des êtres lointains et inconnus n’ont pas d’influence, un monde qui ne croit pas dans les pouvoirs prodigieux d’un groupe select de concitoyens qui s´évertuent à effrayer les autres et profiter de leur ignorance et de leur peur.

Nous, les haïtiens devons assumer la responsabilité de notre vie ainsi que celle de nos familles. Nous devons offrir à nos enfants la meilleure éducation selon nos moyens économiques et, si possible, avec l’aide de l’Etat. Nous devons optimiser l´utilisation de nos maigres ressources financières et freiner la pauvreté de notre progéniture. Il faut combattre le phénomène d´avoir, par exemple, « infiniment » d’enfants d’un nombre « inconnu » de femmes. La femme haïtienne est synonyme de Courage. Elle a un rôle essentiel à jouer dans ce combat.

Nous devons apprendre à être responsables individuellement et en communauté, en commençant par nos leaders politiques, qui doivent nous diriger de façon à ce que notre devise nationale devienne enfin une vérité.

Dorénavant, nous devons nous efforcer à relever les défis auxquels fait face notre pays. Nous devons arrêter de nous entretuer dans cette bataille qui dure déjà 210 ans. Ce n’est pas possible ! Il faut enfin nous mettre à travailler ensemble chaque jour, avec la responsabilité individuelle et collective que nous avons refusée d´assumer tout au long de deux siècles, concentrés dans une lutte acharnée et permanente contre nos rivaux politiques, contre ceux qui ne pensent pas comme nous et même contre nos familles. Soyons conscients que la manne ne va pas tomber du ciel, même si nos erreurs permanentes nous ont conduit à penser que la communauté internationale sera toujours là, prête à nous aider quelle que soit la situation du pays. Travaillons pour attirer les investissements, seule source de richesse.

Haïti doit lutter contre le constat terrible du Président Estimé d’après lequel les bergers du troupeau en sont devenus les loups qui se disputent vulgairement sous nos yeux les restes d’un troupeau efflanqué et exsangue. Cela a été la malédiction du pays : une classe politique non seulement désintéressée du sort de ses concitoyens, mais avide de dévorer même les dernières petites bouchées, voire les miettes des plats des affamés. Haïti ira vers la catastrophe totale si on continue sur le chemin actuel, enfermé dans le cercle vicieux de l´égoïsme de notre classe politique.

C’EST LA FAUTE A NOUS TOUS !

Ne regardons pas autour de nous. Nous, les haïtiens, sommes les seuls responsables. Mais nous avons encore une opportunité si les leaders politiques, avec la participation active et prééminente des femmes, collaborent à changer la mentalité prédominante et assument leurs responsabilités. Il s’agit d’un long chemin, mais il faut l’entreprendre une fois pour toutes. Travaillons pour que cette opportunité-là devienne un jour une réalité matérielle et non imaginaire.

Claudie Marsan, Av. St Spécialiste Senior
Droit des marchés publics
http://www.marches-publics-haiti.com

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